France: des appels au boycott menacent la 53e édition du festival de BD d'Angoulême
Avis de tempête sur le célèbre festival de bande dessinée d'Angoulême, dans le sud-ouest de la France: les appels au boycott et les critiques des grands noms de la BD se multiplient contre l'organisateur de l'événement.
"Le Festival de la bande dessinée d'Angoulême est en danger de mort", ont alerté lundi dans une tribune 22 lauréats du Grand prix, récompense suprême du festival, dont la renommée est mondiale.
En cause: la reconduction de son délégataire historique très contesté, 9eArt+, comme organisateur de l'évènement.
L'appel, publié sur le site du quotidien communiste L'Humanité, est signé notamment des Américains Art Spiegelman et Chris Ware, du Belge François Schuiten, de la Britannique Posy Simmonds et des Français Florence Cestac, Riad Sattouf, Jacques Tardi, Lewis Trondheim ou Willem, y compris la lauréate du Grand prix 2025, Anouk Ricard.
Ces prestigieux auteurs et autrices de BD dénoncent un événement qui "accumule les scandales, les erreurs de communication et le manque d'ambition, tout cela dans une totale opacité de gestion".
"Il est grand temps de tourner la page 9eArt+ pour que le Festival retrouve, avec de nouveaux opérateurs, les valeurs qui ont construit sa notoriété internationale", demandent-ils, à quelques mois de l'édition 2026, prévue du 29 janvier au 1er février.
Depuis l'annonce samedi par l'association propriétaire du festival de BD d'Angoulême (FIBD) de la reconduction de la société 9eArt+, à l'issue d'un appel d'offre très critiqué pour son opacité, la colère du secteur ne retombe pas.
- Prix des entrées -
Cette société privée, vivement contestée, devra toutefois s'associer avec la Cité internationale de la BD et de l'image pour organiser les éditions à compter de 2028.
L'annonce a soulevé l'indignation d'une grande partie du secteur, déjà marqué par une édition 2025 entachée par une grave crise de confiance avec 9eArt+, accusée de dérives commerciales, d'opacité et d'avoir licencié une salariée après une plainte pour viol en 2024.
Sur les réseaux sociaux, les appels au boycott se sont multipliés avec le mot-clé #NOFIBD2026. Anouk Ricard a annoncé qu'elle ne se rendrait pas à Angoulême, tout comme d'autres autrices françaises, comme Pénélope Bagieu ou Catherine Meurisse.
Auprès de l'AFP, Anouk Ricard, 54 ans, sacrée à Angoulême pour son œuvre décalée et absurde, a évoqué une "longue liste" de griefs contre le festival, dont "le prix des entrées, le mépris des auteur.ices, le manque de transparence, le manque d'écoute". "Difficile de dire ce qui dérange le plus", a-t-elle noté.
Poids lourd du secteur, le Syndicat national de l'édition (SNE) a réclamé samedi "une clarification" sur la réorganisation en cours du festival et de la "transparence", faute de quoi il boycotterait les éditions après 2026.
- "Flou" -
Le Syndicat des éditeurs alternatifs (SEA) a lui réitéré son rejet absolu de "la reconduction de cette société et de son dirigeant, Franck Bondoux".
Dans une réaction à l'AFP, le ministère français de la Culture a regretté que "les contours des éditions futures restent flous, en dépit des efforts constants des financeurs publics et des attentes des auteurs, des éditeurs et des festivaliers".
La Cité internationale de la BD et 9eArt+ ont jusqu'au 20 novembre pour présenter un projet commun. Le ministère a dit attendre "l'issue des discussions pour prendre une position définitive".
Le festival, créé en 1974, est organisé par 9eArt+ depuis 2007. Au printemps, sous la pression de ses financeurs publics (État et collectivités locales) et d'un appel d'auteurs au boycott, l'association du Festival d'Angoulême avait mis fin au contrat de 9eArt+, ouvrant à la concurrence l'organisation de l'événement à partir de 2028.
En juillet, le délégataire historique avait annoncé le retrait à cet horizon de son directeur décrié, Franck Bondoux, sans renoncer à candidater à l'appel à projets.
O.Rivas--HdM