
Panne géante d'électricité en Irak, à cause de la canicule et d'une surconsommation

L'Irak a été presque totalement privé d'électricité publique pendant plusieurs heures lundi à cause d'une panne géante provoquée, selon les autorités, par des températures record, atteignant 50°C à Bagdad et dans plusieurs provinces, et une hausse de la consommation.
Dans ce pays de 46 millions d'habitants, où les canicules sont de plus en plus fréquentes, la plupart des foyers peuvent néanmoins s'alimenter grâce aux générateurs, alors que la vague de chaleur actuelle devrait encore durer pendant plus d'une semaine, selon les services météorologiques.
Lundi encore, comme ces derniers jours, le thermomètre a atteint jusqu'à 50°C à Bagdad et dans 11 provinces du centre et du sud du pays.
Selon le ministère de l'Electricité, sous l'effet des fortes chaleurs et de l'augmentation de la demande, deux lignes de transmission se sont arrêtées lundi après-midi, "provoquant une perte soudaine et accidentelle sur le réseau de plus de 6.000 mégawatts", qui a entraîné l'arrêt des centrales électriques.
La hausse de la demande concerne notamment la province de Kerbala, dans le centre du pays, alors que des millions de pèlerins affluent vers la ville sainte chiite à l'occasion de l'importante commémoration religieuse de l'Arbaïn.
"Nos équipes sont actuellement mobilisées sur le terrain pour rétablir progressivement dans les prochaines heures" le réseau, a précisé le ministère de l'Electricité.
La panne a été constatée à travers l'Irak aux alentours de 15H00 (12H00 GMT), selon le ministère, avant que le courant ne commence à être rétabli "de manière progressive" dans les provinces de Dhi Qar et Missane, dans sud.
Pour la province côtière de Bassora, la situation devrait s'être stabilisée d'ici mardi à l'aube, a ajouté le ministère qui n'a pas donné de prévisions pour les autres provinces.
La panne a épargné le Kurdistan autonome, une région du nord de l'Irak qui oeuvre à moderniser son propre secteur et arrive à fournir de l'électricité publique 24 heures sur 24 à un tiers de sa population.
- "Sans électricité, pas de repos" -
Le dossier de l'électricité est ultra-sensible en Irak, un pays extrêmement riche en hydrocarbures mais aux infrastructures en déliquescence, souffrant d'une corruption endémique et de politiques publiques défaillantes.
En été, les coupures qui empirent provoquent régulièrement des manifestations et viennent exacerber la frustration de la population vis-à-vis des élites au pouvoir. Tout comme la sécheresse qui sévit depuis cinq ans aggrave les pénuries d'eau et frappe durement les agriculteurs.
Même sans panne généralisée, les plus démunis des Irakiens doivent vivre au quotidien en supportant une chaleur infernale.
"Il fait chaud, on n'a pas d'électricité, elle vient deux heures et on peut alors dormir un peu et nous reposer", confiait dimanche à l'AFP, dans sa maison aux murs en béton, Haider Abbas, un travailleur journalier de 44 ans.
Ses moyens modestes empêchent ce père de cinq enfants, originaire de la localité d'Al-Qassim dans la province de Babylone, dans le centre de l'Irak, d'acheter un climatiseur. Il doit se contenter d'un rafraîchisseur d'air qu'il remplit sans cesse de bouteilles d'eau.
"Quand j'étais petit, on n'avait pas ces températures", se souvient-il. "Moi, en tant qu'ouvrier, avec 52 degrés je ne peux pas travailler."
En Irak, les canicules sont "plus intenses et plus fréquentes" qu'au 20e siècle, en raison du changement climatique et de facteurs humains, a expliqué à l'AFP le porte-parole des services météorologiques, Amer al-Jaberi.
Il a souligné que les émissions de gaz et les fumées dégagées par les générateurs privés "contribuaient à la hausse des températures".
M. Al-Jaberi plaide pour une "ceinture verte" autour de Bagdad, "pour que la ville respire un peu".
Si la vaste majorité des Irakiens a recours aux générateurs privés, cette source d'électricité ne suffit pas toujours à faire fonctionner tout l'électroménager, notamment les climatiseurs.
Pour vivre sans coupures, l'Irak doit produire environ 55.000 MW durant les pics de consommation. Ce mois-ci, et pour la première fois, les centrales électriques irakiennes ont atteint le seuil des 28.000 MW.
En juillet 2023, un incendie dans une station de transmission dans le sud du pays avait provoqué une panne de courant généralisée.
E.Nieto--HdM