
Venezuela: la cheffe de l'opposition promet "bureaux de vote vides" lors des élections

La cheffe de l'opposition vénézuélienne Maria Corina Machado promet des "bureaux de vote vides" et un "grande défaite du régime" le 25 mai, date des élections législatives et régionales qu'elle appelle à boycotter, près de dix mois après la réélection contestée du président Nicolas Maduro.
L'élection est "une énorme farce que le régime veut monter pour enterrer sa défaite du 28 juillet. Nous allons (...) ratifier cette défaite avec l'absence totale, avec le rejet total, en laissant tous les bureaux de vote vides", affirmé dans une interview jeudi à l'AFP Mme Machado, alors que l'opposition revendique toujours la victoire à la présidentielle de 2024, entachée de fraude selon elle.
"Le 25 mai sera une grande défaite pour le régime, car il va se retrouver absolument seul", assure Mme Machado, 57 ans, lors de cette interview par visioconférence
L'opposante, qui vit dans la clandestinité depuis juillet, dit être contrainte à un "isolement absolu". Elle assure toutefois pouvoir "parler avec des milliers de personnes" et profiter de son temps pour "travailler encore plus dur".
Le Conseil national électoral (CNE) a proclamé M. Maduro, au pouvoir depuis 2013, vainqueur de la présidentielle de 2024 avec 52% des voix mais sans publier les procès-verbaux, se disant victime d'un piratage informatique. Une hypothèse jugée peu crédible par de nombreux observateurs.
L'opposition, qui a publié les procès-verbaux fournis par ses scrutateurs, assure que son candidat Edmundo Gonzalez Urrutia a obtenu plus de 67% des voix.
Une partie de la communauté internationale, dont les Etats-Unis mais aussi le Brésil ou la Colombie, n'ont pas reconnu la victoire de M. Maduro.
Les troubles suivant l'annonce de sa réélection se sont soldés par 28 morts, 200 blessés et 2.400 arrestations. Près de 2.000 prisonniers ont depuis été libérés, selon Caracas.
- "Opportunité" inédite -
Alors que le pouvoir vénézuélien semble bien installé, Mme Machado assure qu'il y "des fractures au sein du système" et qu'il "n'y a jamais eu une plus grande opportunité qu'en ce moment pour réussir une transition vers la démocratie (...) Le régime de Maduro est dans une position de grande vulnérabilité".
"Les Vénézuéliens ont déjà voté le 28 juillet et nous allons faire respecter ce mandat (..) en n'acceptant pas la farce et le piège du 25 mai", a-t-elle ajouté.
Le cheffe de file de l'opposition prédit "une énorme répudiation de la société vénézuélienne et un acte de bravoure et de courage de chaque personne qui refuse d'être forcée d'exercer l'un des droits les plus sacrés en démocratie: le droit de choisir".
"Choisir, et non pas cocher une feuille de papier", relève Mme Machado, selon qui le pouvoir va "assigner" les postes de députés et gouverneurs.
Le pouvoir "vide complètement de son sens le vote en tant qu'expression de la souveraineté populaire", regrette-t-elle, refusant le choix de certains opposants de participer au scrutin.
Le poids-lourd qui a représenté deux fois l'opposition à la présidentielle, Henrique Capriles considère ainsi qu'il faut participer "pour défendre" la victoire de l'opposition à la présidentielle. Selon lui, la politique de la chaise vide adoptée lors du scrutin de 2018 remporté par M. Maduro n'a pas porté ses fruits.
Les opposants participant au scrutin "seront choisis par le régime" qui "leur offre les moyens de l'appareil de propagande officielle", répond Mme Machado. Ces personnes sont "absolument soumises à la stratégie du régime", assène-t-elle.
- "Tyrannie" -
Mme Machado a abordé les sanctions internationales, notamment américaines, qui cherchent à asphyxier économiquement le pays et évincer Maduro du pouvoir mais sont critiquées par une partie de l'opposition, qui estime qu'elles nuisent plus la population qu'au pouvoir.
"Rien ne nuit plus à ce peuple qu’une tyrannie qui persécute, réduit au silence, qui a volé tout l'argent avec les recettes de Maduro qui vont à la corruption, à la répression, à un appareil de propagande qui cherche à semer la terreur", poursuit Mme Machado, jugeant que "le responsable des sanctions est unique, et c'est Nicolas Maduro".
Ce dernier "a commis des crimes contre l'humanité et il est donc nécessaire d'appliquer la justice internationale", selon elle.
"Il y a la faim, nos enfants vont à l'école deux fois par semaine. Le salaire minimum est d'un dollar et demi par mois (...) l'économie chute de manière insoutenable", énumère-t-elle.
Elle assure que M. Maduro "est devenu une gêne pour ceux qui furent ses alliés. Il peut prendre des photos (aux célébrations de la victoire à Moscou), mais tu crois qu'ils vont lui donner un centime ? Jamais (...) Personne ne va risquer (...) de soutenir un régime qu'ils savent en déclin".
"Nous avons besoin du soutien de toutes les démocraties du monde (...) pour accompagner le peuple du Venezuela. Nous ne renonçons pas parce que nous irons jusqu'au bout", conclut-elle, répétant son slogan de la présidentielle.
K.Sosa--HdM